Chandeleur, fiche technique (France) :

- date : 2 février (date fixe)

- type de fête : religieuse, catholique

- fériée ? non

- fêtée depuis : Ve-VIe siècle en Europe de l'Ouest

- célébré : majoritairement dans les pays catholiques (sous ce nom en tous cas)

• Festa candelerum, fête romaine

Sous un seul nom, la fête des chandelles semble plutôt recouper les nombreuses fêtes romaines du mois de février, liées à la purification, cette période étant associée à un dangereux rapprochement avec l'au-delà (voir Jour de l'an).

Le feu étant dans tous les cas un symbole de purification ; les chandelles, un symbole de chaleur et une évocation du soleil.

Les chandelles étaient par exemple utilisées pendant les Amburbiales : une procession le long des murailles de la cité, pour procéder à la purification de la ville. 

Mais les historiens voient généralement dans la Chandeleur un héritage des Lupercales.

Les luperques, ou prêtres de Faunes, vénéraient ainsi le dieu Faunus, en formant une procession aux flambeaux dans les champs à minuit, pour célébrer la sortie de l'hiver.

Ils sacrifiaient aussi un bouc à Pan dans la grotte de Lupercal où, selon la légende, la louve aurait allaité Romulus et Rémus.

Pour l'occasion, les Vestales faisaient offrande de gâteaux préparés avec le blé de l'ancienne récolte, un rite censé garantir la qualité de la prochaine récolte.

Comme pour Imbolc, on retrouve dans les Lupercales un lien à la fécondité, mais sous une forme… pour le moins originale !

Deux jeunes hommes, vêtus d'un pagne en peau de bouc, recevaient du bouc sacrifié un peu de sang sur le front, ainsi que des lanières tirées de sa peau, qu'ils utilisaient pour fouetter les femmes de la ville sur leur passage… ce qui devait les rendre fécondes et leur garantir un enfant dans l'année !

• Fête de l'Ours

Enfin, on peut rapprocher la Chandeleur d'une fête païenne célébrant la sortie de l'hibernation de l'ours, fin janvier ou début février. Les peuples germains, scandinaves et quelques peuples celtes, guettaient la sortie de l'ours de sa tanière pour démarrer les festivités.

Cette fête était caractérisée par des déguisements en ours et des simulacres de viols ou d’enlèvements de jeunes filles... Ce qui peut sembler très violent au premier abord, mais je pense qu'il faut d'avantage y voir cet esprit du carnaval, où tous les interdits devenaient possibles et même mis en scène ; le simulacre de viol servant justement à rappeler son caractère prohibé.

A noter que la fête de l'ours existe toujours en France, dans les Pyrénées orientales, mais elle est désormais associée au carnaval. 

La sortie de l'hiver est en tous cas un thème récurrent, qu'on le fête par la fin de l'hibernation d'un ursidé, le début de l'allaitement d'une brebis ou par une procession aux chandelles dans les champs.

L'arrivée de la chrétienté a mis une certaine unité dans toutes ces fêtes de février et les a ralliées sous la bannière unique d'un rite bien chrétien : la présentation du petit Jésus au Temple par ses parents, 40 jours après sa naissance.

Le choix du 2 février n'est donc pas un hasard, puisque c'est le 40e jour après Noël, la naissance du Christ.

A noter que le nombre 40 est un chiffre-clé dans l'Ancien Testament, qui évoque une longue attente... Moïse n'a-t-il pas passé 40 ans dans le désert à la recherche de la terre sainte ? Noé n'a-t-il pas attendu 40 jours que la pluie cesse lors du Déluge ?

Il faut donc attendre patiemment 40 jours pour que l'hiver donne des signes annonciateurs de sa fin et que la vie semble reprendre.

La symbolique des 40 jours a été déterminée par le pape Gélase au Ve siècle, qui a institué la date du 2 février et a définitivement rattaché la Chandeleur à l'épisode biblique de la présentation au Temple.

Il condamnait en effet les cultes païens persistants en Europe de l'ouest et a choisi de les remplacer par une fête et une date unique, déjà existante chez les chrétiens du Proche-Orient depuis le IVe siècle.

En effet, la présentation de Jésus au Temple est l'une des 12 grandes fêtes orthodoxes. Elle est célébrée le 2 février du calendrier julien, qui équivaut au 14 février du calendrier grégorien.

Les chandelles ont été avantageusement remplacées par des cierges (que l'on bénit pendant la messe de la Chandeleur), dont les flammes représentent la lumière du Christ.

Cependant, il semble que la pratique ait mis du temps à se répandre. Ce serait plutôt à la suite de la peste sous l'empereur Justinien (541) que la Chandeleur prend tout son sens symbolique. Le feu étant encore une fois associé à la purification, nécessaire à la fin d'une telle épidémie.

Mais si les cierges indiquent le fait que « Jésus est lumière », la Chandeleur célèbre aussi la pureté de la vierge Marie.

Une tradition héritée du judaïsme, puisque les femmes sont considérées comme impures par la loi juive après un accouchement. Elles peuvent à nouveau se rendre sur un lieu de culte une fois passé le délai de 40 jours. La tradition juive veut d'ailleurs que le premier-né d'une famille (mâle évidemment), soit amené au Temple 40 jours après sa naissance. Jésus étant juif, il avait donc été amené à se présenter au seigneur, lui aussi.

D'une fête juive, nous sommes donc passés à une fête chrétienne, d'abord orthodoxe, puis catholique. 

Encore une fois, on peut trouver des origines variées au choix de manger des crêpes à la Chandeleur.

Mais dans toutes les fêtes des lumières du monde, on retrouve l'idée commune de manger un dessert « gras » : des beignets pour Hanoucca, un kachori ou un jalebi pour Diwali... Ou un gâteau de blé pendant les Lupercales.

Petit paradoxe : pour s’assurer de belles récoltes et des mois prospères après l'hiver, il faudrait donc céder à la gourmandise !

Certains historiens pensent que les crêpes sont une dérive de la galette, distribuée aux pèlerins venant à Rome dans les premiers siècles après JC.

Simples à préparer et d'une couleur évoquant le soleil, les crêpes auraient supplanté les galettes avec le temps.

Si certains d'entre vous estiment qu'il est crucial de faire sauter plusieurs fois la première crêpe, alors vous êtes proches de la tradition ancestrale ! Le saut multiple de la crêpe servait à conjurer le mauvais sort !

Dans le passé, il fallait faire sauter plusieurs fois la toute première crêpe de la main droite... tout en tenant un louis d'or de la main gauche, qu'il ne fallait surtout pas lâcher !

Les pièces d’or, comme les crêpes, sont un rappel du soleil, mais la pièce est aussi un symbole de prospérité. Elle pouvait être offerte à des personnes démunies, après avoir été enroulée dans la première crêpe et conservée pendant un an à la maison.

Au Mexique, la Chandeleur est un jour férié. On ne mange pas des crêpes, mais des tamales : des papillotes à base de farine de maïs, qui peuvent être consommées salées (fourrées à la viande) ou sucrées (fourrées aux fruits).

A défaut de guetter la sortie de l'ours de sa tanière, une tradition nord américaine consiste à guetter la réaction de la marmotte à la sortie de son terrier. Si elle en sort et ne voit pas son ombre (du fait des nuages dans le ciel), c'est signe que l'hiver finira bientôt. Si elle voit son ombre (du fait du ciel dégagé), cela signifiera que l'hiver durera encore 6 semaines.

Une tradition qui vous est forcément familière si vous avez vu le film Un jour sans fin (Le Jour de la Marmotte au Québec), car il s'agit bel et bien du Groudhog Day, le titre en anglais portant directement le nom de cette fête.

Enfin, dans les îles Canaries, la Chandeleur est avant tout une fête dédiée à Marie, depuis qu'Alonso Fernandez de Lugo, vainqueur de Tenerife, a rendu hommage à la Vierge, qui avait fait une apparition sur cette île d'après la légende.